La plupart du temps on ne se peint, ni ne se dessine, par narcissisme. On ne s’emploie que par commodité : de tous les modèles on est le plus docile, le plus disponible, le moins coûteux et le plus exigeant.
J’ai réalisé ces trois autoportraits ces derniers jours. J’avais pour documents une série de selfies pris hâtivement à l’hôpital, où je séjourne trop souvent ces temps-ci. Images grises, écrasées, prises au lit ou au fauteuil, dans lesquelles je tentais de scruter, entre deux visites d’infirmières, mon humeur et ma déconvenue à passer si souvent entre les mains des chirurgiens.
A partir de tous ces clichés j’avais le vague projet de peindre une huile.
Hélas ma mobilité entravée ne me permet pas d’aller à l’atelier. Pour me distraire de ma frustration je me suis rabattu sur ces images préparatoires. Je me suis exécuté au lavis d’encre de chine sur un papier luxueux, grainé, légèrement absorbant. Je me suis bien des fois déposé sur des supports moins nobles…
C’est un plaisir douteux que d’interroger avec tant d’insistance son regard, de vouloir rendre une peau qui se creuse et s’affaisse, des jouent qui piquent et qui râpent, de déboucher des ombres pour se fouiller, de se griser à plaisir pour mieux s’éclairer, de s’approcher de soi avec tant d’obstination.
Mais quand rien ne va on a les délectations qu’on peut…
Encre de Chine, 30 cm x 15 cm, mars 2015
(cliquer sur les images pour les agrandir)