Je m’étonne d’être aussi joyeux…

il y a 8 ans

nu, acrylique, board, grey, painting, body, soluto

Il fait froid à l’atelier. Le radiateur soufflant s’essouffle. Je dessine à la maison.

Je dessine en écoutant Clément Rosset. Une pleine page trouvée sur La main de Singe. Y a d’la joie, mais ne nous trompons pas : Clément rosse est.

J’avais approché ce philosophe par une émission de Raphaël Enthoven, il y a de nombreuses années, attrapée au vol sur France-Culture. Accroché, j’étais allé aux livres. L’animateur philo, qui m’assurait que j’y entrerais comme dans du beurre,  vantait la simplicité du texte – du texte, pas des idées qu’il renfermait. Il m’avait un peu menti. Il fallait tout de même s’accrocher.

Pour m’aider à aborder ses ouvrages je trouvai les entretiens donnés par ce penseur du tragique pas si avare de sa parole. Régal. Joie d’une diction singulière, alternant le sérieux et l’amusé, le rond et le précipité, les mélangeant souvent. Une parole malicieuse, se nouant à des rires impromptus, doublée d’une puissance de pénétration jubilatoire.

Hier soir, donc, je dessinais en l’écoutant – pour autant qu’on puisse nommer ainsi une main qui musarde en mode automatique sur un bloc sténo. Quand j’ai regardé ce que j’avais commis c’était une femme nue. J’étais content. Pas de mon dessin, encore que. Non j’étais content. Content d’être là, au chaud, dans la lumière douce, penché sur mon bloc, la langue pliée, le sourcil perché, un thé tiède, russe, à portée de paumes,  tout ravi d’avoir écouté la leçon.

Je vole au chat l’attention têtue ou le plaisir idiot de reposer sans question dans ma viande.

Certains jours, même, j’offre mes flancs, mon ventre blanc, ma gorge pour les caresses à ronrons.

Tête de bois, tête de feu…

il y a 9 ans

aquarelle portraits le havre soluto

Dessin préparatoire, crayon sur papier 15 cm x 21 cm, février 2015

aquarelle portraits le havre soluto

Acrylique sur papier, 30 cm x 40 cm décembre 2016

On cherche une idée. Elles trainent parfois dans de vieux blocs. Tiens, celui-là par exemple, à portée de main, à moins d’une éclaboussure de barbouille… Feuilletons. Oui bof, je ne m’attendris pas. Un bonheur de mine de plomb n’a jamais donné d’office un bon dessin. J’en passe, dix, quinze. Vagues souvenirs de transes. Certains m’ont donné du fil à retordre. Je m’interroge. Celui-ci inachevé, pourtant bien commencé et trois pages plus loin celui-là trop poussé, bouché, plus paralysé qu’un écran qui freeze à la surprenante… Ça ne vieillit pas toujours bien les croquis.

Je m’arrête sur ce barbu (le dessin du haut). Flash. Je le vois en couleur, in extenso, dans des terres d’ombre, de Sienne brûlée, de blancs refroidis à l’Outremer. Je ne suis pas un torturé du projet,  du pourquoi. Pas même du comment. Une impulsion me suffit.  J’écrase sur la palette mes gros haricots de couleurs. Le pinceau gazouille sur le papier, bientôt les quatre choisies ne me suffisent plus. Je me dis que mon bonhomme prend des allures de Van Gogh, qu’il mérite son coup de fauve, son envolée de pâtes fraîches. C’est la douce bagarre, la caresse des soies, les effleurements délicats, les coups de brosses nerveux, farouches, vigoureux.

Et ça dure ce que dure l’amour les bons jours. Ça laisse pantois pareil, dubitatif, rêveur, sévère. Où vont se nicher les interrogations des hommes ? Quand vient l’heure de racler sa palette, de laver ses pinceaux on se demande pourquoi ces assauts de peinture, pourquoi tant d’acharnement à maintenir vivante la si fragile conviction qu’on ne vaut qu’en lignes et en couleurs.

On se demande aussi s’il reste encore beaucoup de tableaux à abattre avant d’achever le dernier, si l’on trouvera au retour de l’atelier un peu de cette fameuse terrine de pâté de lapin au frigo et s’il vaut mieux ouvrir un Côte-du-Rhône ou une Duvel pour lui jeter un sort..

Soupçons…

il y a 9 ans

aquarelle portraits le havre soluto

Aquarelle 16 x 24 cm

On sourit comme un saint
On ne bronche pas
Quand le vent souffle fort on s’aplatit, creuse le ventre, serre les fesses
On attend que ça passe
On ne se lève pas
Le moindre mouvement éveille l’attention du chasseur
On ne joue pas non plus au plus fin
Plutôt que museler on laisse parler, on rassure, on restaure
Fantasmes, ruminations minent, mentent
Les fragiles grimpent aux cocotiers, décrochent les fusils, tirent dans le tas
Plus modestement les dupés, les floués, les trompés se meurtrissent, s’asticotent, se tarabustent
Ils veulent se guérir du doute, rêvent de preuves, se ravagent
Puisqu’il faut qu’ils compliquent, qu’ils complotent, qu’ils tricotent ou qu’ils supputent
Puisqu’il importe qu’ils tiennent, qu’ils sachent, qu’ils mordent
Qu’on leur jette au museau une chanson d’été, rincée de sanglots, déminéralisée, lascive et irisée.
Mais surtout qu’on n’avoue rien

Puisqu’ils ne supportent pas la vérité, qu’on la leur épargne

La mémoire qui tient bon… Jeanne Moreau, Jeanne Amour …

il y a 9 ans

aquarelle portraits Jeanne Moreau soluto

Jeanne Moreau Aquarelle 16 x 24 cm

Enfant, déjà lassé de Sylvie Vartan, effrayé par Sheila, tout affolé par les sautillantes Clodettes dont la plus noire d’entre elles me tourneboulait, je trouvais le repos en rêvant de Stéphane Audran que j’avais vu à la télé dans La Femme Infidèle. Plus tard j’aperçus dans les coulisses du Mystific la jolie Jeanne en tenue légère. Comme je lui trouvais un air de ressemblance avec l’une de mes jeunes tantes mon plaisir fut dans un premier temps étouffé.
Par chance je la retrouvai quelques années plus tard magistrale, veuve et tueuse dans un film de Truffaut. Je décidai alors de l’aimer pour la vie.
Pour l’instant je tiens parole. J’attends qu’elle me déçoive.
Heureusement tout de même que je ne lui avais pas promis l’exclusivité.

Ras la seringue…

il y a 9 ans

aquarelle portraits le havre soluto

J’ai commis ce sticker il y a trente ans. J’étais jeune…
Une amie vient de me le renvoyer, je ne l’avais pas oublié. Nous avions à cette époque la gauche vendue et Rocard en ligne de mire. Force est de constater que tout n’a fait qu’empirer, que la santé décline, que la précarité n’émeut personne, que les politicards de tous poils ne se donnent même plus l’apparence de la vertu.
Ma fibre militante, déjà bien lâche à cette époque, ne vibre plus. Je me méfie de mon prochain, de tous ces pauvres qui feraient des riches exécrables, de tous ces assoiffés de vengeances qui ne se remettent pas de tant de maltraitance quotidienne et qui tourneraient allègrement tortionnaires si on leur confiait les manettes. Perplexité donc à l’égard de tous ces privés de paroles qui ne professent que des conneries à longueur de sondage ou de micro-trottoir, qui jouent au loto sportif, qui rêvent à Disneyland et qui se rendent au musée en troupeau parce qu’on a transformé la culture en produit culturel bien emballé. Je vis à l’abri des apôtres du vivre ensemble et du sympa.
Je n’aime pas les gens.

Mais toi, là, qui me lis, toi avec qui je passerais bien un moment si la vie se comportait mieux (ML), toi tout seul privé de tes poteaux, avec tes problèmes d’homme et de mélancolie (LF), ben tu vois, je pourrais rire et pleurer avec toi, batailler et débattre jusqu’à te donner raison sans me sentir flouer, t’écouter et te soigner jusqu’au bout. Je pourrais même, si ça se présentait bien, mieux me bouger les miches pour toi que pour moi-même.

Et ne me remercie pas.
Ce n’est pas drôle de vieillir…

Quand le bonheur en passant vous fait signe et s’arrête….

il y a 9 ans

peinture huile le havre soluto

Ces bandeaux sont la rencontre de dessins épars, automatiques, trouvés dans mes carnets, et de bouts de textes (extraits de notes, de courriers, de journaux personnels). Pour l’instant je n’ai encore rien écrit, ou dessiné, « exprès ». Je ne me l’interdis pas. Un jour peut-être… Mais c’est pour l’instant le fortuit qui m’intéresse, le côté cadavre exquis sur deux niveaux.

Si la mise en couleur est numérique, la mise en disponibilité, en valeur, et en jambe sont on ne peut plus analogiques et aléatoires.