
Récitant Jules Laforgue il se disait pour lui-même:
— Oh ! qu’ils sont chers les trains manqués
Où j’ai passé ma vie à faillir m’embarquer !….
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C’est rue de la Crique que j’ai fait mes classes
Au Havre dans un bar tenu par Chloé
C’est à Tampico qu’au fond d’une impasse
J’ai trouvé un sens à ma destinée
On dit que l’argent est bien inodore
Le pétrole est là pour vous démentir
Car à Tampico quand ça s’évapore
Le passé revient qui vous fait vomir
C’est là qu’j’ai laissé mes joues innocentes
Oui à Tampico je m’suis défleurie
Je n’étais alors qu’une adolescente
Beaucoup trop sensible à des tas d’profits
Les combinaisons n’sont pas toujours bonnes
Comme une vraie souris j’ai fait des dollars
Dans ce sale pays où l’air empoisonne
La marijuana vous fout le cafard
On m’encourageait j’en voyais de drôles
Je vidais mon verre en fermant les yeux
Quand j’avais fait l’plein je voyais l’pactole
Et les connaisseurs trouvaient ça curieux
Une fille de vingt ans c’est pour la romance
Et mes agréments semblaient éternels
Mais par ci par là quelques dissonances
En ont mis un coup dans mon arc-en-ciel
C’est là qu’j’ai laissé derrière les bouteilles
Le très petit lot de mes p’tites vertus
Un damné matelot qui n’aimait qu’l’oseille
M’en a tant fait voir que j’me r’connais plus
Oui il m’a fait voir le ciel du Mexique
Et m’a balancée par un beau printemps
Parmi les cactus dans l’décor classique
Où l’soleil vous tue comme à bout portant
Un coq shangaïé un soir de folie
A pris mon avenir de même qu’un cadeau
Il m’a dit « Petite il faut qu’on s’marie
Tu seras la fleur d’un joli bistrot »
De tels boniments démolissent une femme
Je m’voyais déjà derrière mon comptoir
Les flics de couleur me disaient « Madame! »
Bref je gambergeais du matin au soir
Mon Dieu ramenez-moi dans ma belle enfance
Quartier Saint-François au Bassin du Roi
Mon Dieu rendez-moi un peu d’innocence
Et l’odeur des quais quand il faisait froid
Faites-moi revoir les Neiges exquises
La pluie sur Sanvic qui luit sur les toits
La ronde des gosses autour de l’église
Mon premier baiser sur les chevaux d’bois
«Ce serait un moindre mal de mourir si l’on pouvait tenir pour assuré qu’on a du moins vécu.»
[Clément Rosset] – Le Réel et son double
Des fois j’en cause avec mon gars, qui me regarde alors avec des yeux ronds… Pour lui, pas de problème, la réalité du monde, il en est la preuve vivante… Moi, je suis plus dubitatif… Qu’on vienne me prouver que j’existe ! Que tout ce qui parait être n’est pas que la mise en scène d’un faux cerveau déréglé qui s’invente en continu (Et c’est pas René Desbrèmes qui pourrait oser me dire le contraire ! Il serait culotté ! Parce que sa soluce, à lui, son dieu organisateur qui vient boucher le grand trou vacant et sa preuve ontologique à deux balles, elle me parait un tantinet artificielle, si j’peux m’permettre !…)… Parfois, quand elle fait ses comptes-rendus, j’enquiquine Moly avec mes interrogations rigolardes (car tout ça ne me rend pas triste… Au contraire !… Manquerait plus que ça, de n’être pas et de se prendre au sérieux…) Elle essaie alors de me faire taire en sous-entendant que je me fais du mal (tu parles…) Mais j’insiste en espérant la troubler un peu (je ne prends pas de gros risques, elle est du lot des bienheureux qui ne doutent de rien et qui se déplacent dans un monde de certitudes…) Je suis comme ça…
Taquin et content de moi…
Pourquoi me lancé-je sur mon grand sujet secret et vous en entretiens-je ? Parce que c’est la fin de l’année, que ça me travaille la substance en délicatesse et que j’aime bien, en guise de cadeaux, partager mes questions…
Et en plus, pas vache, comme le sujet de mon post est épineux, vous êtes dispensés du ménage et des commentaires (laissez seulement les clés dans la boite en partant et venez me claquer un bécot sur facebook… ça suffira comme ça)!
L’attitude parfait de l’immobile qui regarde le train de la vie passer sous son nez…
Regarder , ne pas agir … ne pas oser .
Etre spectateur et non acteur de sa propre vie .
Attendra t il encore longtemps ? Il faut lui souhaiter qu’un prochain train lui fasse faire le pas … mais quand ?